Monsieur J. B. Pioda
Envoyé Extraordinaire et Ministre-Plénipotentiaire
de la Confédération Suisse près le Roi d'Italie
à Bellinzona1
Zurich, le 21 Mars 1871
Cher Monsieur et Ami
M. Grattoni écrit sous date du 17 courant à Monsieur l'Avoyer Zingg ce qui suit:
«Moi aussi j'espère que, maintenant que la paix est faite, on finira par prendre une conclusion définitive entre les parties intéressées à l'égard du S. Gothard. Mais cette conclusion pourrait subir encore de fâcheux retards. Dans notre Chambre, il vient de se manifester une puissante opposition qui a son point d'appui dans les pays de l'Italie méridionale et de l'Italie centrale – ces derniers se considèrent comme satisfaits par le Brenner, et les premiers disent ouvertement qu'il faut finir les chemins de fer méridionaux avant d'aborder un nouveau passage des Alpes.
Le Ministère lui-même n'est pas encore décidé à pousser l'affaire en avant à cause des difficultés financières qui ont été l'objet d'une communication faite avant-hier à la Chambre par le Ministère des Finances, qui a conclu à la nécessité d'une émission nouvelle de 150/mm de billets de Banque, et d'une augmentation de l'impôt direct.
Je pourrais vous ajouter d'autres symptômes pas trop rassurants et puisés dans une conversation que j'ai eue hier avec un des nos Ministres; mais je dois conserver toute ma réserve à cet égard, et je me limiterai à vous dire que je crois le moment venu pour le Comité d'envoyer | ici une personne capable avec le mandat de voir fréquemment les Ministres, ainsi que les personnages parlementaires les plus influents.
Monsieur de Gonzenbach, lorsqu'il a été ici l'année passée, a pu se convaincre de l'opportunité de sa présence ici: et veuillez observer que les difficultés sont beaucoup plus fortes maintenant que l'année passée».
Pensant que M. Grattoni doit connaître à fond la situation à Florence, je me hâte de vous communiquer ce qui précède. Il me semble de la plus haute importance que vous puissiez faire valoir, aussitôt que possible, votre influence à Florence, dans cette affaire qui intéresse si éminemment la Suisse.
Je n'ai pas manqué de communiquer à Monsieur de Gonzenbach ce même passage de la lettre de M. Grattoni, et de le prier, contrairement à ce que je vous ai écrit hier, de se rendre immédiatement à Florence.
En vous confirmant le reste de ma lettre d'hier, je vous prie d'agréer, cher Monsieur et Ami, mes sentiments affectueux.
Votre tout dévoué2